ALBERT HUGUES:
Le jeûne chez le Martinet Le 2 septembre 1893 je trouvais dans un champ labouré un Martinet (Cypselus apus), l’aile cassée, se traînant péniblement sur les mottes. L'ayant placé dans un trou (barbacane) d'une muraille de ma basse-cour, afin de l’y laisser mourir tranquille, je fus très étonné de le voir encore vivant quelques jours après. Peu remuant, il tombait rarement de son trou, où je le replaçais et dont il ne disparut que le 22 septembre, croqué par un Chat. En raison de son aile cassée et de la position qu’il occupait sans son trou, ce Martinet a dû subir une privation de nourriture sinon totale, du moins fort grande. J'ignorais à cette époque, la' demi-affirmation de Brehm, qui avance qu’on a vu des Martinets vivre jusqu'à six semaines sans manger. Des expériences sur l'essor du Martinet, publiées par mes collègues et amis MM. Gal et G. Mingaud (1), il résulte que le Martinet adulte, pris en mai, ne résiste que trois jours à la privation de nourriture. Ayant pu me procurer un jeune Martinet tombé du nid et trouvé rampant dans la rue le 5 juillet 1907 à 6 heures du matin, je l'isolai sans nourriture; il mourut le 12 juillet, à 8 heures du matin, après six jours, deux heures, de jeûne; il est utile de dire, qu’au moment de sa capture , l’Oiseau paraissait très affaibli. Grâce à l'obligeance de M. Galien Mingaud, directeur au Musée d'histoire naturelle de Nîmes, j'ai pu faire de nouvelles expériences, d'abord sur deux jeunes Martinets pris au nid, et sur un adulte, tous capturés dans les trous d'aération du Musée. Les deux jeunes, pris le 23 juillet à 9 heures du matin, pesaient respectivement 57 et 68 grammes. Isolés dans des boîtes en carton percées de quelques petits trous, ils furent placés avec leurs boîtes dans une caisse d'élevage pour chenilles, entièrement vide. Le premier se blessa le 4 août et mourut le 5 à 7 heures du matin, soit au bout de 13 jours moins deux heures; il ne pesait plus que 26 grammes, ayant perdu 42 grammes sur son poids primitif de 68; pendant son jeûne, les plumes de l'Oiseau avaient atteint leur développement normal. L'animal mesurait 17 centimètres de longueur et 40 centimètres d'envergure. Le second Martinet de 57 grammes ne mourut que le 13 août à 6 heures du matin; il avait vécu 21 jours moins trois heures sans nourriture; il mesurait 16 centimètres de longueur et 39 centimètres d'envergure; il pesait, mort, 21 grammes, ayant perdu 36 grammes de son poids. Le 3 août je reçus, toujours du Musée, un mâle adulte; il ne pesait que 25 grammes et mourut après un jeûne de 4 jours pendant la nuit du 7 au 8 août; mort, il pesait 22 grammes; il est juste de faire remarquer que le poids de 25 grammes n’est pas celui d’un Martinet adulte (2) que l'Oiseau était très maigre et que de nombreuses expériences sont encore utiles pour trancher la question du jeûne chez le Martinet. Il faudrait étudier la résistance à la mort par inanition du Cypselus apus pendant tous les mois de l'année, qu'il passe parmi nous, expérimenter sur des individus de tout sexe et de tout âge, étant donné qu'il semble résulter des deux expériences que j'ai faites en juillet dernier que l'Oiseau pris au nid supporte allègrement un jeûne prolongé et qu'avant de rejeter la demi-affirmation, de Brehm, il convient de se documenter sur ce qui peut l'avoir induit à l'écrire. Que ceux de mes contrères que la question intéresse et qui disposent de nombreux loisirs veuillent bien élucider ce point de physiologie ornithologique. References
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(Printed
1907 in Bulletin de la Société Zoologique de France.)
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©APUSLife 1998, No. 0246 |